jeudi 24 juillet 2014

L’inauguration de l’Orphelinat


Le gotha de la ville l’attendait. Le maire ceint de son écharpe tricolore, les adjoints dans leurs plus beaux costumes, le procureur en habit noir, le proviseur avec sa fameuse cravate rose, les commerçants endimanchés, le docteur sombre et sérieux comme à son habitude, et tout ce que la petite sous-préfecture comptait de notables.
Pour l’occasion la façade, les fenêtres, la porte d’entrée, avaient été décorées de guirlandes fleuries multicolores. C’est le directeur de l’institution en personne, un homme bedonnant aux cheveux gris, qui l’avait accueillie. Avec force amabilités et déluge de compliments pour la jolie princesse.
« Altesse Sérénissime mon cul » songeait Rosse de la Vérole. « Tu es comme les autres, satisfait de recevoir une tonne de fric de mon cornard de mari pour ton foutu orphelinat. »
Elle avait visité l’établissement au pas de charge, écoutant d’une oreille distraite les explications pontifiantes de son directeur. La petite blondinette qu’on lui avait collée d’office dans les bras, elle l’avait pincée. Discrètement mais fermement, en tournant pour que ça lui fasse plus mal. L’enfant s’était mise à brailler. Elle l’avait refilée à la première puéricultrice qui passait par là en lui disant : « Débarrassez-moi ! Ça morve. »
À la fin de la visite elle avait émis le désir de s’entretenir en tête à tête avec le directeur. Manière d’évoquer l’avenir de l’orphelinat. Rouge de confusion l’homme s’était empressé de lui faire les honneurs de son bureau. Une fois la porte refermée, Rosse s’était assise sur le bord du bureau, avait retroussé sa robe de soie jusqu’aux hanches et fait tomber sa fine culotte sur la moquette grise. Tout en écartant les cuisses elle avait regardé le bonhomme droit dans les yeux : « Allez gros lard, fais-toi plaisir, cadeau de la Principauté ! »
Le bonhomme était devenu écarlate. Quand une princesse ordonne on obtempère. D’une main tremblante il avait dénoué sa ceinture et bientôt son pantalon était à ses chevilles. Il ahanait, soufflait, transpirait à grosses gouttes. En deux minutes l’affaire était réglée.
En vérité se faire tirer par ce peine à jouir ne fut pas pour Rosse une partie de plaisir. Ce qui l’amusait, c’était d’imaginer son mari, son Altesse Sérénissime himself, fou de rage en apprenant qu’elle l’avait trompé avec ce gros poussif à la sueur aigre et à l’haleine de poireau. Accessoirement elle trouvait rigolo la tonne d’emmerdements que n’allait pas manquer de rencontrer ce vicelard de directeur quand himself saurait…
Quand on s’appelle Rosse de la Vérole, que son quotidien est bouffé par les mondanités, de petits riens suffisent à se distraire.
 
méchamment écrit par Pierre Mangin

4 commentaires:

  1. De mieux en mieux ou de pire en pire, la Sérénissime !

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  2. Quand la méchanceté s'en mêle...

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  3. Il y a des moments où la méchanceté confine a la connerie quand même.
    Parce que se faire sauter par un type suant à l'haleine de poireau, faut en vouloir!

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  4. comme quoi on peut être méchant ET con ;-)

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